Jack Malroy

Présentation

Jack Malroy n’a jamais vraiment choisi de traquer les monstres. Il a juste cessé de les fuir.

Il est né dans une maison où les silences pesaient plus que les cris. Un père militaire, autoritaire, silencieux jusqu’à la menace. Une mère effacée, souvent absente même lorsqu’elle était là. Très tôt, Jack a appris à écouter ce qu’on ne dit pas. À lire l’air, à deviner l’orage derrière les visages. Il s’est construit dans l’ombre, entre les éclats de voix et les placards fermés à double tour.

À dix ans, il a vu un voisin s’en aller menotté. Personne ne lui a dit pourquoi. Il a trouvé les réponses dans les journaux. Et c’est là, peut-être, que quelque chose s’est allumé. Une curiosité froide, brutale. Le besoin de comprendre pourquoi certaines personnes franchissent la ligne. Pourquoi certaines y vivent.

Il est entré au FBI comme on entre en religion : avec l’idée qu’il fallait comprendre pour arrêter. Il s’est spécialisé dans le comportement humain, dans les fractures psychologiques, dans la mécanique tordue des tueurs en série. Les premiers temps, il croyait qu’il pourrait changer quelque chose. Que comprendre suffisait à empêcher.

Et puis les années ont passé. Les scènes de crime se sont empilées dans sa tête. Les visages des victimes ont commencé à le suivre jusque dans ses rêves.
 Il ne les oublie jamais.
 Il ne se le permet pas.

Il y a eu cette affaire, aussi. Celle dont il ne parle pas. Celle qui revient quand il ferme les yeux trop longtemps. Un gamin. Une erreur. Une décision prise trop tard. Un appel manqué.
 Depuis, Jack ne dort plus vraiment. Il somnole. Il fonctionne.
 Il vit à moitié dans le monde réel, à moitié dans celui des morts.

Ce n’est pas un homme en paix. Ce n’est pas non plus un homme détruit. C’est quelqu’un qui tient debout sur la ligne de crête, sans jamais poser le pied d’un côté ou de l’autre. Un funambule sur une corde faite de doutes, de dossiers et de regrets.

Il ne croit plus en la rédemption. Pas pour lui. Il ne croit pas non plus au mal absolu. Ce qu’il traque, c’est le fil rouge, le motif dans le chaos, l’ombre logique dans les ténèbres. Il décortique les monstres, non pour les excuser, mais pour mieux les neutraliser.

Dans sa tête, tout est compartimenté. Il parle peu. Il pense trop. Il anticipe les mensonges, détecte les micro-hésitations, les regards qui fuient. Il voit les failles chez les autres comme un chirurgien voit les organes sur une radio. Mais ses propres blessures, il les garde bien scellées.

Il a été marié, une fois. Ça a tenu deux ans. Il n’en parle jamais, et personne n’a vu de photo dans son bureau. Peut-être qu’il a aimé. Peut-être qu’il a juste cru que c’était possible. Il vit seul, désormais, dans un appartement impersonnel où le café est toujours froid et les murs toujours nus. Il a des livres, des dizaines. Tous annotés. Et un vieux tourne-disque, qu’il allume parfois les nuits d’insomnie.

Il n’a pas d’amis. Des collègues, oui. Des partenaires, parfois. Mais personne à qui il se livre. Il ne supporte pas les fêtes, les réunions inutiles, les blagues entre flics pour tuer le malaise. Il préfère le silence. Le bruit des dossiers qu’on ouvre. Les détails qui s’assemblent.

Jack Malroy n’a pas choisi ce métier pour sauver des vies.
Il l’a choisi parce que c’est le seul endroit où ce qu’il est peut encore servir à quelque chose.
Parce qu’il ne sait rien faire d’autre que regarder le mal, le suivre à la trace, et l’emmener au bout de sa propre logique.

Il est fatigué. Lucide. Brisé mais fonctionnel. Et tant que quelqu’un saigne quelque part, il continue.

Non pas par devoir.
 Par nécessité.
 Parce qu’il sait ce que ça fait, de vivre dans l’ombre.
 Et parce qu’il a appris à s’y repérer mieux que personne.